Mutinerie à la sûreté de Conakry : Le film de l’évènement …(Vidéo)

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CONAKRY-La tentative d’évasion spectaculaire de prisonniers à la Maison d’arrêt de Conakry, ce lundi 9 novembre 15, relance de plus belle la problématique de l’emplacement de ce centre pénitencier. Situé en plein cœur de la capitale, la prison civile a été le théâtre de violents affrontements entre certains détenus et les services de sécurité.


Il était 9h30 quand les tirs ont commencé  à l’intérieur de la prison, selon des témoins. Pris de panique, les gardes pénitenciers fuient la zone et laissent le ‘’ gang’’ des mutins régner en maître des lieux. Certains profitent pour prendre la poudre d’escampette. Les plus chanceux réussissent à s’éclipser dans la nature alors que d’autres sont aussi vite rattrapés.

La nouvelle se répand  alors comme une trainée de poudre dans la cité administrative et centre  d’affaires de la capitale guinéenne. Les services de sécurité mobilisent les moyens les plus lourds pour étouffer dans l’œuf ce mouvement d’humeur. Toute la hiérarchie militaire se met en branle. Il ne fallait rien laisser au hasard d’autant plus que la prison accueille des bandits de grand-chemin, mais aussi des officiers supérieurs aguerris dans le maniement des armes. La bande à Nouhou Thiam et Cie, mais aussi du commandant AOB et autres, tous accusés dans l’affaire de l’attaque qui a visé le domicile du Chef de l’Etat en juillet 2011, y sont incarcérés depuis environs cinq ans.

La machine de riposte se met en marche, mais la stratégie manque pour arriver à bout des mutins.  Pendant environs  deux heures d’horloge, la prison civile, la plus grande du pays, située au quartier Coronthie, a été transformée en une véritable zone de combat. Les forces de  l’ordre, tous services confondus, mobilisés pour mâter un « groupuscule » de mutins, harassés par leurs conditions de détention. Des tirs en rafale résonnent comme dans un film de guerre. Un premier bilan non exhaustif fait état de plusieurs blessés dans les deux camps (prisonniers et geôliers) et des dégâts matériels importants.

Les crépitements d’armes automatiques dans la confusion totale, sèment  une panique générale mêlée de peur chez les habitants du quartier Coronthie, qui demandent tout simplement aux autorités, la délocalisation de cette  prison. 

Entouré de sa famille, les yeux hagards,  Mohamed Lamine Touré, la cinquantaine, assis sous l’ombre d’un arbre devant sa concession qui  juxtapose la maison centrale, décrit la peur qu’il a vécue avec ses proches, dans la matinée du lundi.

« On avait peur et nous étions paniqués », a-t-il confié à notre reporter, demandant aux autorités de délocaliser la prison. « Vraiment il faut délocaliser cette prison », a interpelé le quinquagénaire.

Croisé dans les rues insalubres qui avoisinent la prison, Lansana Camara, habitant du même quartier de Coronthie, interpelle directement le Chef de l’Etat, sur la nécessité de dégager ce centre pénitencier de la capitale. « Nous demandons au président de la République de nous aider à enlever cette prison ici. Parce que si cette tentative d’évasion s’était passée la nuit, ça aurait été dramatique », s’est-il inquiété.  

 A quelques mètres de sa concession, un piquet y est installé, des gendarmes profitent du vent humide qui souffle sous un soleil de plomb, après des heures de combat.  En face, un trou béant laisse apparaitre l’intérieur de la prison. Ce sont les prisonniers qui l’ont creusé. Mais comment  ont-ils réussi à creuser ce trou sur un mur aussi épais, sans attirer l’attention des agents.  Un garde, esquive notre question, en nous demandant  « s’ils peuvent faire face à des gens armés alors qu’eux, ils ne le sont pas et ils n’ont pas reçu l’ordre de tirer ».

Ce soldat a peut-être raison. Puisqu’au moment chaud de la bataille, au moment où on entendait certains officiers enjoindre leurs  subordonnés  de foncer pour l’assaut final, certains agents se plaignaient du  manque de munitions ou de grenades lacrymogènes, alors que d’autres, bien qu’étant armés, faisaient montre d’une peur inouïe d’approcher  les lieux du combat.  

« Si on te  descends là-bas,  on t’aura tué pour rien. Moi je n’y vais  pas », entendait-on dire un agent qui causait avec son ami. Ils marchent quelques mètres et s’arrêtent sous une véranda et dégaine deux coups. Pendant ce temps certains de leurs collègues faisaient face à la pluie de projectiles provenant de l’intérieur de la prison.

Dans cette atmosphère de « chaos », alors que les tirs de rafales d’armes automatiques, résonnaient de partout, nous entendons, une conversation plutôt drôle entre agents. « Aurait été moi, la solution est simple. Une simple grenade aurait suffit pour les maitriser. Une seule fois, Pobom puis c’est terminé ! », lance un agent qui causait avec ses collègues.

Après plus d’une heure  d’affrontements, la situation demeure toujours confuse et non maîtrisée, malgré l’arrivée des renforts, venus de la haute banlieue. Des officiels arrivent et demandent des explications aux officiers sur place. D’abord le porte-parole du Gouvernement, Damantang  Albert Camara, puis le Premier Ministre Mohamed Said Fofana, ensuite le chef d’Etat-major général  des armées, le Général Namory Traoré, qui seront dispersés par une grenade lacrymogène venue de nulle part, avant que les tirs nourris ne recommencent de plus belle quelques minutes après.

Dans l’après-midi,  la situation sera finalement maitrisée, certains prisonniers transférés dans des endroits de la capitale tenus secrets. Si l’on peut se réjouir qu’il n’y ait pas eu de pertes en vie humaines, (selon la version officielle) en dépit des blessés et des dégâts enregistrés, cet épisode qui laisse planer beaucoup d’interrogations, met à nue les défaillances, voir même le manque de professionnalisme  notoire des services de maintien d’ordre.

La maison d’arrêt de Conakry construite dans les années « 50 » pour environs 200 personnes, accueille aujourd’hui plus de 1. 400 prisonniers. En avril dernier le Gouvernement a lancé les travaux de construction d’une prison moderne à Yorocoguia, dans la préfecture de Dubréka.

 

Un reportage de Diallo Boubacar 1

Pour Africaguinee.com

Tel: (00224) 655 31 11 12

Créé le 10 novembre 2015 17:32

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