Massacre du 28 septembre 2009 en Guinée: Faut-il protéger les juges?

Plusieurs membres de la junte en 2009 dont le Capitaine Dadis Camara (au premier plan), le Colonel Pivi (à gauche) et le Général Sékouba Konaté (à droite)

PARIS-Après l'inculpation de Moussa Dadis Camara et l'annonce de l'audition du Général Sékouba Konaté, faut-il craindre pour la sécurité des juges en charge du dossier du massacre du 28 septembre 2009?Pour Corinne Dufka de Human Right Watch, la sécurité des juges est l'une des clés pour assurer rendre justice aux victimes de ce massacre qui avait plus 157 morts et une centaine de viols.L'activiste  des droits de l'Homme s'est confiée à notre rédaction sur le massacre du 28 septembre 2009…


AFRICAGUINEE.COM : Madame Corine Dufka bonjour !

CORINNE DUFKA : Bonjour Monsieur Souaré !

Comment avez-vous accueilli l’annonce de l’inculpation de l’ex chef de la junte guinéenne, Moussa Dadis Camara, dans le cadre de l’enquête sur les massacres du 28 septembre 2009 ?

L’inculpation est un pas décisif et Human Rights Watch se félicite des efforts fournis par les juges pour aider la justice à sanctionner les auteurs des abus effroyables qui ont été commis. Une fois que les investigations seront terminées la voie sera ouverte pour que les poursuites continuent afin de mettre fin aux six années d’attente qu’ont dû endurer les victimes. Cela étant dit, l’inculpation de l’ex-président pourrait induire certains risques, c’est pour cela que nous demandons aux autorités guinéennes d’assurer la sécurité nécessaire aux juges et de prévenir toute violence ou menace à l’encontre des juges, des témoins et des victimes. Poursuivre les prétendus coupables de manière juste et équitable est essentiel afin d’assurer la réparation envers les victimes mais aussi afin de consolider le respect de l’Etat de droit en Guinée.

Récemment vous avez demandé la mise en congé administratif de certains officiers supérieurs de l’armée guinéenne comme le Colonel Claude Pivi et Moussa Thiéboro Camara. Pensez-vous que leurs fonctions actuelles pourraient influencer le déroulement de la procédure judiciaire en cours ?

Depuis longtemps, nous avons recommandé que ceux qui ont été inculpés soient mis en congé administratif. C’est ce qui se doit, parce que les personnes inculpées peuvent user de leur fonction pour influencer le déroulement des enquêtes, juste parce que soit les juges, soit des témoins, ou encore des victimes, ont été victimes d’intimidation. La mise en congé doit préserver la présomption d’innocence tout en protégeant l’indépendance et l’impartialité de l’investigation.

Croyez-vous à la tenue d’un procès avant la fin de cette année ?

Les victimes attendent ce procès depuis longtemps. Cependant, nous ne sommes pas en mesure de répondre à cette question. Seuls les juges qui ont en charge de conduire ce dossier pourront se déterminer sur la date éventuelle de la tenue d’un procès, bien sûr après avoir terminé leur enquête. Le dossier a tout de même beaucoup progressé : plus de 400 victimes ont été interrogées, plus de 12 personnes ont été inculpées, et des témoins faisant partie des forces de sécurité ont été interrogés. Depuis que l’enquête a commencé, son progrès a par moment été freiné par un climat politique instable et le manque de volonté du Gouvernement. Cela dit, durant l’année passée, le processus a pris suffisamment d’élan pour que nous puissions croire à une suite favorable à l’enquête. Nous encourageons aussi les juges à mener des enquêtes pour trouver d’autres victimes pour compléter la liste.

Certains observateurs estiment que tous les anciens dignitaires du régime militaire du CNDD doivent être entendus dans ce dossier. Qu’en dites-vous ?

Nous soutenons toute idée qui vise à interroger un quelconque membre des forces de sécurité, ou tout civil, pour vu que cela soit en rapport avec l’enquête sur les massacres du 28 septembre 2009.

Avez-vous un appel à lancer aux autorités guinéennes ?

Cette investigation a une signification très importante pour les victimes et leurs familles. L’aboutissement de cette procédure doit également permettre de combattre la réputation d’impunité qui est restée collée à la Guinée pendant toutes ces années. Des victimes et activistes ont fait campagne pour que la justice veille à ce que ce type d’abus ne soit pas toléré en Guinée. Nous demandons aux autorités de coopérer pleinement et de soutenir ce processus, de respecter l’indépendance de la justice et de s’assurer que tous les éléments de cette enquêtes soient étudiés afin d’assurer que l’enquête se termine dans les meilleurs conditions possibles.

En plus, nous pensons que les enquêtes ne doivent pas se focaliser sur les évènements du 28 septembre 2009 seulement. Nous demandons au Gouvernement de faire en sorte que la justice se penche également sur les autres violences qu’il y a eu dans le pays, comme l’assassinat de plusieurs manifestants en 2007, mais aussi les victimes des violences politiques de 2013. Et dans un passé très récent, il y a eu des agents de sécurité qui ont été accusés de graves exactions durant les manifestations politiques des mois d’Avril et Mai 2015.

Madame Corinne Dufka merci !

Merci à vous Monsieur Souaré.

Interview réalisée par Mamadou Hassimiou Souaré
Africaguinee.com©, Juillet 2015

Créé le 18 juillet 2015 09:51

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