Le Burkina Faso va demander au Maroc l’extradition de Compaoré

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OUAGADOUGOU-Le Burkina va demander au Maroc l'extradition du président déchu Blaise Compaoré, a annoncé jeudi le premier ministre intérimaire Isaac Zida, alors que les autorités de transition ont déjà menacé à plusieurs reprises l'ancien régime de sanctions.


«Si au niveau de la justice, une plainte est déposée contre le président Compaoré, je pense que nous allons demander au Maroc, bien qu'il n'y ait pas d'accord de justice (…) de mettre le président Compaoré à la disposition de la justice burkinabé», a déclaré M. Zida lors d'une rencontre avec la presse nationale.

Blaise Compaoré a fui son pays le 31 octobre pour se réfugier en Côte d'Ivoire avant de rejoindre le Maroc le 20 novembre. Fer de lance du soulèvement contre l'ex-chef de l'Etat, la société civile appelle à des poursuites judiciaires contre Compaoré.

Le lieutenant-colonel Zida a par ailleurs annoncé que le dossier du président Thomas Sankara serait «entièrement rouvert» et que la «justice» serait «rendue».

Le capitaine Thomas Sankara, considéré comme le «Che africain», a été assassiné le 15 octobre 1987 lors d'un coup d'Etat qui a porté au pouvoir son ami et frère d'armes Blaise Compaoré.

La famille Sankara demande depuis 1997 l'exhumation du corps de ce héros national, icône du panafricanisme, pour vérifier que le corps enterré est bien le sien, ce que la justice burkinabè n'a jamais accepté.

Dès son investiture, le président de la transition Michel Kafando a annoncé que des investigations seraient menées pour identifier sa dépouille présumée.

«Aucun dossier pendant ne va dormir», a assuré le premier ministre. Celui de Norbert Zongo, un journaliste assassiné en décembre 1998 alors qu'il enquêtait sur la mort de David Ouédraogo, le chauffeur de François Compaoré, le frère cadet du président Compaoré, suivra «le même processus», a-t-il poursuivi.

«Une bonne partie des dossiers» sera jugée «pendant la transition», dans laquelle «la justice a un rôle fondamental», a remarqué le lieutenant-colonel.

Le premier ministre n'a pas non plus exclu la nationalisation de certaines entreprises privées.

«Il y a des dossiers des crimes économiques qui seront ouverts. S'il le faut nous allons nationaliser des entreprises parce que ce qui a été construit avec l'argent du peuple doit revenir au peuple», a indiqué M. Zida, réaffirmant la ligne des nouveaux dirigeants de combattre la corruption.

Diendéré congédié

Le président de la transition au Burkina, Michel Kafando a par ailleurs destitué le chef d'état-major particulier du président déchu Blaise Compaoré, considéré comme son plus fidèle compagnon d'armes.

Dans un décret lapidaire, le président Kafando a annoncé qu'il «est mis fin aux fonctions du général de brigade Gilbert Diendéré».

Fidèle de M. Compaoré jusqu'au bout, M. Diendéré a été impliqué dans le coup d'Etat de 1987. M. Diendéré est tombé en disgrâce sous le lieutenant-colonel Zida, son ancien subalterne au RSP.

Le président Kafando a également nommé le général de brigade Pingrenoma Zagré «chef d'état-major général des armées».

Le général Zagré, qui était jusqu'à présent chef d'état-major adjoint, remplace le général de division Nabéré Honoré Traoré, qui lui a été nommé «conseiller spécial» de M. Kafando.

Armée divisée

Le général Traoré s'était déclaré chef de l'Etat peu avant la démission du président Compaoré, chassé du pouvoir le 31 octobre après 27 ans de règne par un soulèvement populaire.

Considéré comme trop proche de l'ex-dirigeant, M. Traoré avait été rejeté par la foule avant d'être contraint de céder la place au numéro 2 du Régiment de sécurité présidentielle (RSP), le lieutenant-colonel Yacouba Isaac Zida.

Lors de son investiture, le président Kafando avait annoncé une réforme de l'armée burkinabè, trop divisée.

Isaac Zida, qui cumule les fonctions de premier ministre et de ministre de la Défense, avait également annoncé une réforme de l'armée burkinabé, dont la cohésion a été fortement entamée par une cacophonie après le départ de Compaoré.

En 48 heures, trois hauts gradés s'étaient déclarés chef de l'Etat. Le général à la retraite Kouamé Lougué, un officier respecté des hommes du rang, avait lui aussi tenté de prendre le pouvoir.

Un journaliste président de l'Assemblée

Autre moment fort de la journée, l'élection d'un journaliste burkinabè à la présidence de l'Assemblée intérimaire de son pays à l'issue de sa première session jeudi à Ouagadougou.

Patron du journal Bendré, Cherif Sy, 54 ans, a obtenu 71 voix contre 14 à Ibrahima Koné, un responsable de parti politique, lors du vote des 90 conseillers que compte cette nouvelle institution appelée «Conseil national de transition» (CNT).

Juste après son élection, M. Sy, candidat malheureux au poste de président de la transition, a assuré qu'il allait donner le «meilleur de lui-même».

L'inauguration de l'Assemblée intérimaire du Burkina Faso s'est faite en présence de l'ensemble de ses conseillers, parmi lesquels 25 militaires en uniforme. La composition du CNT avait donné lieu à des jours de discussions.

Ses autres membres, dont 30 sont issus de l'opposition au président déchu Blaise Compaoré, 25 de la société civile et 10 de la précédente majorité, étaient présents pour cet événement qui s'est déroulé à l'Hôtel des députés, à plusieurs kilomètres du centre de la capitale.

L'Assemblée nationale avait été incendiée le 30 octobre lors des manifestations qui ont provoqué la démission de M. Compaoré. Le président déchu voulait réviser la Constitution afin de se maintenir au pouvoir.

AFP

Créé le 28 novembre 2014 09:42

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